lundi 23 mai 2011

DE LA MISE EN GAGE DES TITRES PRECAIRES PORTANT SUR DES PARCELLES DE TERRAINS EN DROIT POSITIF MALIEN


L’institution des garanties accompagnant les créances civiles ou commerciales est une préoccupation fondamentale aussi bien pour les créanciers que pour les débiteurs.
Pour les créanciers, il y a amélioration de la certitude pour eux de récupérer leur créance et pour le débiteur, la facilitation de bénéficier du concours qu’ils sollicitent.
Lorsqu’un créancier accorde à son débiteur un délai pour exécuter son obligation, rien ne lui garantit que celui-ci s’exécutera dans le temps qui lui était imparti ou encore, qu’à cette date, il sera solvable.
L’article 2093 du code civil français dispose : « Les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers ; et le prix s'en distribue entre eux par contribution, à moins qu'il n'y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence ».
Ainsi, il faudra rappeler que le créancier qui ne dispose d’aucune garantie déterminée est considéré comme créancier chirographaire.
A ce titre, il bénéficie comme tout autre créancier d’un droit de gage général, c'est-à-dire du droit de saisir les biens de son débiteur défaillant.
En effet, ce droit ne permet d’établir ni un rang de préférence de paiement, ni d’empêcher ce dernier de céder certains biens afin d’organiser progressivement son insolvabilité.
Il s’agit donc d’un droit qui n’offre au créancier qu’une sécurité limitée.
Pour éviter le risque de se retrouver avec une créance impayée face à un débiteur insolvable, le créancier a donc tout intérêt à renforcer sa situation en exigeant de son débiteur que soit constituée une sureté particulière notamment portant sur un bien mobilier ou immobilier ou une valeur mobilière ou immobilière.
Lorsque la garantie porte sur ceux-ci, il s’agit ainsi des suretés réelles qui peuvent être définies comme celles consistant dans l’affectation d’un bien pour garantir le paiement d'une créance, et ce par préférence sur le prix de réalisation dudit bien.[1]
Le gage constitue une sûreté réelle mobilière par opposition à l’hypothèque qui est une sûreté réelle immobilière.
Le plus souvent, dans le cadre des relations contractuelles, les débiteurs sont appelés à consentir des conventions de gage en mettant à la disposition de leur créancier des titres dits précaires portant sur les parcelles de terrains en vue de garantir l’exécution d’une obligation à leur charge. Il s’agit des lettres d’attribution, des permis d’occuper, les concessions urbaines.
Ces titres confèrent à leur titulaire des droits d’usage et d’habitation sur une parcelle de terrain.
La nature ou le caractère de ce droit est déterminé par les dispositions de la loi n° 02-008 du 12 février 2002 portant modification et ratification de l’ordonnance n° 00-027/P-RM du 22 mars 200 portant code domanial et foncier du Mali.
D’un point de vue pratique la mise en gage de ces titres ne pose aucun problème particulier.
Par ailleurs, quant à leur réalisation, celle-ci pose d’énormes difficultés en raison de la polémique relative à l’interprétation des dispositions du texte de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur les voies d’exécution.
Ces difficultés sont aujourd’hui de nature à douter de l’efficacité de la garantie que peut offrir de tels titres qui pourtant peuvent faire l’objet de gage d’un point de vue légal.
Très souvent la tendance est de faire croire que les titres précaires sur lesquels portent des conventions de gage ne peuvent être réalisés qu’après une immatriculation préalable conformément aux dispositions de l’article 253 de l’Acte Uniforme de l’OHADA portant Procédure Simplifiée de Recouvrement et des Voies d’Exécution.[2]
La présente analyse consiste à lever ces multiples équivoques sur la question tout en élucidant la problématique juridique posée.
Bien que la jurisprudence malienne ou de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ne s’est pas encore, à notre connaissance, prononcé sur cette problématique en ce qui concerne le cas précis du Mali en raison de la particularité des lois nationales en la matière, nous nous proposons de résoudre la question à travers l’analyse combinée des différents textes nationaux et communautaires relatifs à la problématique.
De prime à bord, et à titre de rappel nous tenons à préciser qu’en matière domaniale au Mali, seuls les immeubles immatriculés peuvent faire l’objet de droit réel immobilier dont l’hypothèque, les autres droits conférents aux parcelles de terrains bâtis ou non bâtis constituent des droits réels mobiliers. Ils sont appelés des titres précaires.
Ainsi cette analyse se déclinera en deux grandes parties :
ü Le caractère mobilier et la constitution du gage portant sur les titres précaires ;
ü La réalisation des titres précaires donnés en gage.

I. LE CARACTERE MOBILIER ET LA CONSTITUTION DU GAGE PORTANT SUR LES TITRES PRECAIRES

Aux termes des dispositions de l’article 516 du code civil français tous les biens sont meubles ou immeubles.
Ainsi, il convient de déterminer d’abord le caractère mobilier de ces titres avant d’examiner les règles relatives à la formation ou la constitution du contrat de gage dont ils peuvent faire objet.

A. Le caractère mobilier des titres

L’article 527 du code civil français précise que les biens sont meubles par nature ou par détermination de la loi.
Aussi, faut- il rappeler que parlant des titres précaires, il s’agit du Permis d’occuper, de la concession urbaine ou rurale, de la lettre d’attribution.
Aux termes des dispositions de l’article 273 de la loi n° 02-008 du 12 février 2002 portant modification et ratification de l’ordonnance n° 00-027/P-RM du 22 mars 200 portant code domanial et foncier du Mali : « les terrains attribués sous forme de lettre d’attribution ou de permis d’occuper avant l’entrée en vigueur du présent code sont assimilés à la Concession Urbaine ou Rurale à usage d’Habitation et régis par ses articles 59 à 63 (Ter) à compter de sa date de promulgation ».
La concession urbaine ou rurale consiste selon les dispositions de l’article 60 de la loi précitée « dans le droit accordé par la puissance publique, le concédant, à une personne appelée concessionnaire de jouir, à titre provisoire, de l'usage d'un terrain pour le mettre en valeur selon des conditions prévues dans l'acte de concession et le cahier des charges éventuellement y annexé »

Les dispositions de l’article 61 alinéa 2 de la même loi, le droit de superficie conféré par la Concession Urbaine ou Rurale à usage d'Habitation est réputé meuble et précise qu’il peut être inscrit au livre foncier.
Les dispositions de l’article 63 de la loi précitée énoncent clairement sans équivoque que le droit de superficie conféré par ces titres dits précaires ainsi que les constructions réalisées sur le terrain pourront être mis en gage.

Ainsi, il n’ya plus aucun doute sur le caractère mobilier de ces titres dans la mesure où la loi de la façon la plus claire et expresse en détermine. A ce titre les titres précaires dont s’agit constituent des meubles par détermination de la loi.

De l’analyse combinée de ces différentes dispositions précitées, on relève qu’il n’y a aucun doute par rapport au caractère mobilier des droits conférés par les titres précaires sauf à en préciser leur constitution.

B. La constitution des titres précaires en gage

Le gage est le contrat par lequel un bien meuble est remis au créancier ou à un tiers convenu entre les parties pour garantir l’exécution d’une obligation.

C’est dans ce cadre précis que très souvent les titres précaires portant sur les parcelles de terrains sont remis par les débiteurs aux créanciers pour garantir l’exécution d’une obligation à leur charge.

L’article 63 ci-dessus évoqué dispose clairement que : « Le droit de superficie conféré par la Concession Urbaine ou Rurale à usage d'Habitation ainsi que les constructions réalisées sur le terrain, pourront être mis en gage. La mise en gage sera constatée par acte authentique dont expédition sera conservée par l'autorité administrative concédante. Mention de cette mise en gage sera faite sur la Concession Urbaine ou Rurale à usage d'Habitation et sa copie ainsi que sur le registre des Concessions Urbaines ou Rurales à usage d'Habitation tenu par ladite autorité.».

Il ya lieu de préciser qu’il n’existe pas de différences fondamentales quant à leur constitution par rapport à d’autres biens meubles. Seulement les textes nationaux précisent que cette mise en gage sera constatée par acte authentique dont expédition sera conservée par l'autorité administrative concédante tout en précisant que mention de cette mise en gage sera faite sur la Concession Urbaine ou Rurale à usage d'Habitation et sa copie ainsi que sur le registre des Concessions Urbaines ou Rurales à usage d'Habitation tenu par ladite autorité.

Outre ces formalités particulières, leur constitution, comme tout autre bien meuble, est soumise aux conditions suivantes :

Ø La créance à garantir n’a pas à être certaine : elle peut être antérieure, future ou éventuelle;
Ø Le gage ne peut porter que sur un meuble corporel ou incorporel ;
Ø Le constituant du gage doit être titulaire du droit ;
Ø La chose doit être remise au créancier gagiste ou à un tiers convenu[3].

Comme rappeler ci-dessus, la constitution des titres précaires ne pose pas de difficultés particulières mais leur réalisation pose très souvent des problèmes d’ordre pratique liés à l’interprétation erronée de certaines dispositions légales.

II. LA REALISATION DES TITRES PRECAIRES GAGES

La grande difficulté réside dans l’interprétation des dispositions de l’article 253 précité. Il convient alors d’énoncer cette interprétation qui est erronée avant de d’indiquer la procédure appropriée.

A.L’interprétation erronée des dispositions de l’article 253 de l’AUPSRVE

Cet article dispose : « Si les immeubles devant faire l'objet de la poursuite ne sont pas immatriculés et si la législation nationale prévoit une telle immatriculation, le créancier est tenu de requérir l'immatriculation à la conservation foncière après y avoir été autorisé par décision du président de la juridiction compétente de la situation des biens, rendue sur requête et non susceptible de recours.
A peine de nullité, le commandement visé à l'article 254 ci-après ne peut être signifié qu'après le dépôt de la réquisition d'immatriculation et la vente ne peut avoir lieu qu'après la délivrance du titre foncier ».

Par ailleurs, le rappel des dispositions des articles 117 et 119 de l’Acte Uniforme sur les sûretés parait utile en ce qu’elles définissent l’hypothèque comme une sûreté réelle immobilière conventionnelle ou forcée et que seuls les immeubles immatriculés peuvent faire l’objet d’une hypothèque. Toutefois qu’il est possible de prendre hypothèque sur un droit réel en cours d’immatriculation si les textes nationaux permettent de prendre une telle inscription provisoire à condition de prendre une inscription définitive lorsque le titre aura été crée.

Il ya lieu de faire la distinction entre la propriété immobilière ou le droit immobilier et des autres formes de possession et droits d’occupation du sol, s’agissant de la lettre d’attribution, du permis d’occuper ou de la concession urbaine/rurale, qui ne sont, en principe, susceptibles d’inscription hypothécaire.

L’application de la procédure de saisie immobilière suppose naturellement que le bien saisi ait le caractère d’un bien immobilier. Dans le cas contraire, il conviendra d’utiliser la procédure de saisie relative aux biens mobiliers ou la procédure de saisie appropriée à la nature du bien concerné.[4]

Ainsi les dispositions de l’article 253 précité ne sauraient être appliquées à une convention de gage.

Elles ne peuvent concerner que les conventions d’hypothèque consenties sur la base d’un droit réel en cours d’immatriculation conformément aux dispositions de l’article 119 de l’Acte Uniforme sur les sûretés.

Or s’agissant des titres précaires, objet d’une convention de gage, il n’ya aucune raison que les règles relatives à l’hypothèque soient applicables.

La convention de gage constitue la volonté des parties (le débiteur et le créancier), imposer une autre charge au créancier en dehors de sa volonté constituerait une atteinte à la liberté volontariste des contractant surtout que c’est la loi elle-même qui autorise leur mise en gage.

Ainsi il convient d’indiquer la procédure appropriée quant à leur réalisation.

B. La Procédure appropriée de réalisation des titres précaires gagés

Il n’ya plus aucun doute par rapport au caractère mobilier des titres précaires portant sur les parcelles de terrains. Il a été aussi clair qu’ils peuvent faire l’objet de gage par application des dispositions pertinentes du code domanial et foncier du Mali.

Les dispositions de l’article 63 nouveau de la loi n° 02-008 du 12 février 2002 portant modification et ratification de l’ordonnance n° 00-027/P-RM du 22 mars 200 portant code domanial et foncier du Mali énoncent que si le débiteur ne satisfait pas à ses engagements vis-à-vis du créancier, celui-ci pourra faire jouer la garantie selon les règles générales de réalisation de gage.[5]

Il ya lieu de préciser à ce niveau qu’il n’ya aucune contradiction entre la loi nationale et le texte communautaire, qui prime sur la loi nationale, en ce sens que la loi nationale parle du gage donc du droit réel mobilier alors que les dispositions de l’article 253 de l’AUPSRVE sont relatives aux hypothèques donc des droits réels immobiliers. La confusion créée résulte d’une interprétation erronée des dispositions de l’article 253 précité.

Il convient alors de faire cas aux règles générales de réalisation de gage.

Faute d’exécution à l’échéance, le créancier gagiste muni d’un titre exécutoire peut faire procéder à la vente forcée du titre gagé, huit jours après une sommation faite au débiteur dans les conditions prévues par les dispositions de l’Acte Uniforme OHADA portant Procédure Simplifiée de Recouvrement et des Voies d’Exécution.[6]

Cette procédure de vente forcée est régie par les dispositions des articles 91 à 152 de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur les voies d’exécution.

Aux termes des dispositions de l’article 91 de l’AUPSRVE : « tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d’un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu’ils soient ou non détenus par ce dernier, afin de se payer sur le prix ».

L’obtention du titre exécutoire ne pose pas de problème dans la mesure où la convention de gage est un acte notarié. Il suffit d’y apposer la formule exécutoire.

La procédure de saisie vente doit commencer par un commandement de payer adressé au débiteur saisi par le créancier saisissant. Ce commandement est un exploit d’huissier qui doit contenir, à peine de nullité, les mentions énumérées par les articles 92 et 93 de l’AUPSRVE. La signification ne peut être faite au domicile élu.[7]

Certains auteurs soutiennent que la sanction du défaut de commandement de payer n’a pas été prévue par les dispositions de l’Acte uniforme sur les voies d’exécution. Qu’en l’absence de texte, la nullité de la procédure de saisie vente ne pourra être prononcée pour défaut de commandement préalable. Que l’ultime sanction, dans ce cas, consistera dans la mise en œuvre de la responsabilité personnelle de l’agent d’exécution.[8]

Il faut relever que cette position est quand même contraire à certaines décisions de justice qui ont annulé le procès verbal de saisie vente pour défaut de commandement.[9]

A l’expiration du délai de huit jours à compter de la signification du commandement, l’huissier établit le procès verbal de saisie conformément aux dispositions des articles qui sera signifié au débiteur dans les huit jours de ladite saisie.

L’exploit de signification doit indiquer, à peine de nullité, que le débiteur dispose un délai d’un mois pour procéder à la vente amiable de son titre gagé dans les conditions prescrites par les articles 115 à 119 de l’Acte uniformes sur les voies d’exécution tout en les reproduisant dans ledit exploit.
Il convient de faire remarquer que, pour échapper à la vente forcée, le débiteur peut vendre volontairement le bien saisi qui a été remis à son créancier pour garantir l’exécution de l’obligation à sa charge. Cette vente volontaire se fait dans les conditions déterminées par les articles 115 à 119 de l’Acte uniforme sur les voies d’exécution.
A défaut d’une vente amiable, il sera procédé à la vente forcée en vue de désintéresser le créancier saisissant.
En définitive il faudra retenir que les parties ne peuvent être obligées que parce qu’elles l’ont voulu. Les parties sont tenues de respecter leurs engagements sans qu’il y ait besoin d’aucune autre condition. Aussi bien la doctrine que la jurisprudence ont reconnu ce principe sacro saint du droit.

Dans le cas de l’espèce, ce principe a été réconforté par la loi nationale malienne en ce qu’elle a autorisé la mise en gage des titres précaires portant sur les parcelles de terrains et a décidé que leur réalisation se fera selon les règles générales de réalisation de gage.

Ainsi les règles propres aux droits réels immobiliers dont l’hypothèque ne sauraient recevoir application à des conventions de gage qui concernent uniquement les droits réels mobiliers.

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[1] Article 2 alinéa 2 de l’Acte Uniforme de l’OHADA portant organisation des sûretés.

[2] Article 253 de l’Acte Uniforme de l’OHADA portant Procédure Simplifiée de Recouvrement et des Voies d’Exécution : « Si les immeubles devant faire l'objet de la poursuite ne sont pas immatriculés et si la législation nationale prévoit une telle immatriculation, le créancier est tenu de requérir l'immatriculation à la conservation foncière après y avoir été autorisé par décision du président de la juridiction compétente de la situation des biens, rendue sur requête et non susceptible de recours.
A peine de nullité, le commandement visé à l'article 254 ci-après ne peut être signifié qu'après le dépôt de la réquisition d'immatriculation et la vente ne peut avoir lieu qu'après la délivrance du titre foncier ».

[3] Voir les articles 45 à 48 de l’Acte Uniforme de l’OHADA sur les sûretés.
[4] ACTE UNIFORME OHADA Les études pratiques de Ernst &Young en Afrique, Editions FFA, ERNST & YOUNG INTERNATIONAL P 670 1.2.
[5] Article 63 (Nouveau): Le droit de superficie conféré par la Concession Urbaine ou Rurale à usage d'Habitation ainsi que les constructions réalisées sur le terrain, pourront être mis en gage. La mise en gage sera constatée par acte authentique dont expédition sera conservée par l'autorité administrative concédante. Mention de cette mise en gage sera faite sur la Concession Urbaine ou Rurale à usage d'Habitation et sa copie ainsi que sur le registre des Concessions Urbaines ou Rurales à usage d'Habitation tenu par ladite autorité.Si l'attributaire ne satisfait pas à ses engagements vis-à-vis du créancier, celui-ci pourra faire jouer la garantie selon les règles générales de réalisation de gage.
Toutes les contestations, exceptées celles relatives à la mise en gage de la Concession Urbaine ou Rurale à usage d'Habitation sont de la compétence de la juridiction administrative

[6] Voir article 56 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des sûretés.
[7] Article 92 : La saisie est précédée d'un commandement de payer signifié au moins huit jours avant la saisie au débiteur, qui contient à peine de nullité:
1) mention du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées avec le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts;
2) commandement d'avoir à payer la dette dans un délai de huit jours, faute de quoi il pourra y être contraint par la vente forcée de ses biens meubles.

Article 93 : Le commandement contient élection de domicile, jusqu'à la fin de la poursuite sauf nouvelle élection de domicile signifiée au débiteur, dans le ressort territorial juridictionnel où l'exécution doit être poursuivie si le créancier n'y demeure pas. Il peut être fait, à ce domicile élu, toute signification ou offre.

Article 94 : Le commandement doit être signifié à personne ou à domicile. Il ne peut être signifié à domicile élu. Il peut être délivré dans l'acte de signification du titre exécutoire.

[8] OHADA Recouvrement des créances Anne-Marie H. Assi-Esso Ndiaw Diouf JURISCOPE COLLECTION DROIT UNIFORME AFRICAIN BRUYLANT BRUXELLES UNIDA Page 122 Point 252.
[9] Jugement n°42 du 20 février 2003, Ohada.com/Ohadata J-04-307 ; ordonnance de référé n° 1382 du 8
septembre 2003 Ohadata J-04-35.

jeudi 17 février 2011

BREVES OBSERVATIONS SUR LE RENOUVELLEMENT DU BAIL COMMERCIAL A DUREE DETERMINEE EN OHADA

Le bail commercial est souvent un élément essentiel du fonds de commerce. Pour cette raison, dans le souci de la protection du locataire-commerçant et de ses fonds de commerce le non renouvellement du bail à son terme ouvre droit à une indemnité. Ce droit du locataire est parfois aussi appelé propriété commerciale.

Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail et donner congé au locataire à condition de payer une indemnité d’éviction. Ce droit du locataire est parfois aussi appelé propriété commerciale.

Dans l’espace OHADA, le bail commercial est régi par l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général.

Les difficultés couramment rencontrées dans la pratique sont tantôt liées à la fixation de la durée du bail et tantôt à son renouvellement avec toutes les difficultés relatives aux clauses dérogatoires et à l’indemnité d’éviction.
I. LA FIXATION DE LA DUREE DU BAIL
Le contrat portant sur la location d’un immeuble affecté à l’une des activités susvisées peut avoir une durée déterminée ou indéterminée fixée librement par les parties concluantes. (Art.73 AUDCG)
Il sera réputé conclu pour une durée indéterminée lorsque les parties n’ont pas fixé de terme ou lorsque le bail n’a pas fait l’objet d’écrit entre elles.
Dans le cas d’un bail à durée déterminée et s’agissant de la durée du renouvellement, lorsque les contractants prennent le soin de la préciser dans leur contrat, cette volonté s’impose à eux et devient alors leur loi .
En revanche, en l’absence de telle précision relativement à la durée du contrat renouvelé, le contrat sera considéré comme un bail à durée déterminée de trois ans. (Art.97AUDCG).
Il s’agit là d’une durée fixée par la loi lorsque les parties, dans le cadre d’un contrat à durée déterminée renouvelable, ne prévoient pas expressément la durée par rapport à la période du renouvellement. Dans ce cas, cette durée s’impose aux parties dès lors qu’elles acceptent expressément ou implicitement le renouvellement sans que la durée soit librement fixée par elles.
L’échéance du bail constitue une source fréquente de litiges entre le bailleur et le preneur qu’il faut sans doute chercher à surmonter.
Dans la plupart des cas, les conflits entre bailleur et preneur trouve leurs sources dans la mauvaise rédaction du contrat conjuguée à une interprétation erronée de la loi.


II. CONDITIONS DE RENOUVELEMENT DU BAIL
Le renouvellement du bail à durée déterminée est soumis à des conditions et procédures bien spécifiées par l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général.
Le droit au renouvellement du bail qu’il soit à durée déterminée ou indéterminée est acquis au preneur qui justifie avoir exploité conformément aux stipulations du bail, l’activité prévue par le contrat, pendant une durée minimale de deux ans. (Art.91 AUDCG).
Ce renouvellement est soumis à des procédures précises suivant qu’il s’agisse du bail à durée déterminée ou indéterminée.
Toutefois, en raison des difficultés qu’il pose de plus en plus, c’est le renouvellement du bail à durée déterminée qui retiendra notre attention.
Dans le cadre d’un bail à durée déterminée, l’obligation est faite au preneur, qui entend renouveler le contrat le liant au propriétaire de l’immeuble, de le solliciter au plus tard trois mois avant la date d’expiration dudit bail. La sanction de cette obligation mise à la charge du preneur est la déchéance de son droit au renouvellement.
Il faut tout de même rappeler que si la demande de renouvellement est faite par acte extrajudiciaire, en occurrence par voie d’huissier, le bailleur ne dispose que d’un délai d’un mois pour faire connaitre sa réponse et à défaut, le renouvellement sollicité est réputé avoir été accepté par le bailleur. (Art.92AUDCG).
La problématique du renouvellement du bail soulève en réalité la question du sort des clauses dérogatoires et de l’indemnité d’éviction.
Ø Le sort des clauses dérogatoires
La présence de volonté même expresse des parties contractantes, notamment s’agissant d’une clause de tacite reconduction, ne peut aucunement empêcher l’application des dispositions relatives à l’obligation faite au preneur de demander le renouvellement du bail par acte extrajudiciaire dans le délai impératif de trois mois avant l’expiration de celui-ci.
Cette impérativité s’explique par le fait qu’il s’agit là de dispositions d’ordre public auxquelles les parties ne peuvent déroger de sorte que de telles stipulations ne tiennent pas lieu de loi à ceux qui l’ont faites en raison de leur illégalité.
Lorsque le preneur est déchu de son droit au renouvellement, sauf renouvellement accepté expressément ou implicitement, le maintien de celui-ci au terme du contrat constitue une voie de fait qui ouvre droit au juge même des référés d’intervenir pour faire cesser le trouble manifestement illicite.
La compétence du juge des référés s’explique par la déchéance du preneur de son droit au renouvellement ayant pour corollaire la fin du lien contractuel précédemment existant entre le bailleur et le preneur.
Toutefois, au cas où le droit au renouvellement est acquis au preneur en vertu de la loi, le bailleur ne peut s’opposer au renouvellement qu’en réglant au preneur, une indemnité d’éviction.
Ø L’indemnité d’éviction
Le contentieux relatif à l'indemnité d'éviction tourne autour de deux idées :
- Le principe du versement d’une indemnité en cas d'éviction du local commercial du locataire par le propriétaire
- L’exception au principe du versement de l’indemnité d'éviction : la faute du locataire
Il faut alors surtout distinguer selon que l’indemnité d’éviction est due ou non.
Or, très souvent, le litige a pour origine le refus par le bailleur de régler l’indemnité d’éviction auquel prétend le locataire.
En effet, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d’aucune indemnité.

L’exploitation de l’activité - Le bailleur peut, lorsque le preneur exploite l’activité pendant une période de moins de deux ans ou si ce dernier ne parvient pas à justifier qu’il l’a exploitée conformément aux stipulations du bail, décider de ne plus renouveler le contrat sans avoir à régler une indemnité d’éviction.
D’après les dispositions de l’article 95 de l’Acte Uniforme susvisé,deux cas peuvent justifier l’opposition du bailleur au droit au renouvellement et sans paiement aucun d’indemnité d’éviction.
Le motif grave et légitime - Lorsque le bailleur justifie d’un motif grave et légitime à l’encontre du preneur, il n’a aucune obligation de régler l’indemnité d’éviction.
En effet, il s’agit là d’une inexécution par le preneur d’une de ses obligations substantielles, tel le non paiement du loyer, ou la cessation de l’exploitation.
Dans ce cas, il ne pourra être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois, après une mise en demeure d’avoir à les faire cesser.
D’ailleurs, cette mise en demeure est une condition impérative de la recevabilité de l’opposition du bailleur.
La démolition de l’immeuble objet du bail - Dans le cas où le bailleur envisage de démolir l’immeuble comprenant les lieux loués et de le reconstruire, le preneur bénéficiera d’un droit de priorité pour se voir attribuer un nouveau bail dans l’immeuble ainsi reconstruit.
Le législateur de l’OHADA n’a pas précisé la forme que doit revêtir la justification à apporter par le bailleur qui sera, en tout état de cause, tenu d’apporter la preuve de sa prétention relativement à la démolition et à la reconstruction des lieux loués conformément au droit commun.
Toutefois, on pourrait aisément imaginé que s'il est établi que l'immeuble doit être totalement ou partiellement démoli comme étant en état d'insalubrité reconnue par l'autorité administrative ou s'il est établi qu'il ne peut plus être occupé sans danger en raison de son état, alors sa démolition serait justifiée et le preneur ne pourra prétendre à une indemnité d’éviction quelconque.
La reprise des locaux accessoire pour habitation - Dans l’hypothèse d’un bail portant les locaux principaux professionnels et ceux accessoires destinés à l’habitation, le bailleur qui justifie la reprise des locaux accessoires pour les habiter lui-même ou les faire habiter soit par son conjoint, ses ascendants, descendants ou ceux de son conjoint peut s’opposer au renouvellement du bail relativement aux locaux accessoires sans être tenu du paiement d’aucune indemnité d’éviction. (Art.96AUDCG).
Cette reprise ne sera possible que lorsque le preneur ne parvient pas à démontrer que les locaux accessoires sont indispensables à la jouissance de l’exploitation.
Même si le législateur de l’OHADA n’en parle pas, il faudra observer qu’une révision du contrat s’imposera aux parties en raison de la modification de l’objet du contrat en ce sens que le preneur sera privé d’une partie des locaux, objet du bail.
Contrairement au droit français, la reprise dans ce cas précis ne concerne pas la totalité des lieux loués mais seulement ceux destinés à l’habitation.
Autres motifs - L'indemnité d'éviction n'est pas due lorsque le non renouvellement est justifié par une faute du locataire. Il s’agit de l’exception au principe du droit légal au versement d'une indemnité. La faute peut est constituée par le non paiement des loyers et des charges, une absence d’exploitation du fonds, une utilisation non conforme du local pris à bail par rapport à sa destination, la déspécialisation illicite du local, des dégradations dans le local, le défaut d'assurance du local, l’absence de réalisation des réparations locatives, le non règlement des frais de réparations locatives, Etc ….
Souvent, la défaillance du preneur est sanctionnée par une clause du bail commercial dénommée « clause résolutoire » ou « clause de résiliation de plein droit » et le formalisme de la notification de cette faute est encadrée par la loi.
En tout état de cause, les parties sont libres de négocier et de s’entendre amiablement sur le montant de cette indemnité afin d’éviter un contentieux judiciaire.
A défaut d’accord amiable entre le bailleur et le preneur, le montant de l’indemnité d'éviction est fixé par le Tribunal.
Si le bailleur ne propose aucune indemnité d’éviction, le preneur a la faculté de saisir le juge compétent afin d’en obtenir.

En définitive, il ya lieu de faire observer que les dispositions de l’Acte Uniforme OHADA portant droit commercial général relatives aux conditions et formes de renouvellement du bail à durée déterminée en ce qui concerne l’article 92 qui met à la charge du preneur l’obligation de faire la demande de renouvellement dans le délai de trois mois au plus tard sous peine de déchéance sont d’ordre public. Leur application ne peut être éludée ni par les parties encore moins par le juge.
Faut-il relire ces dispositions de sorte à ce que les parties contractantes puissent renouveler automatiquement leur bail sans qu’il y ait lieu de recourir à une demande expresse du preneur ?
Toujours est-il que, lorsque le renouvellement intervient expressément ou implicitement, le contrat est valable entre les parties et doit être exécuté de bonne foi.
En revanche, lorsque le bailleur s’oppose au renouvellement alors que le preneur a manqué à l’obligation d’en faire une demande expresse dans le délai indiqué, ce dernier sera sans doute déchu de son droit au renouvellement.
Cette déchéance peut être constatée par le juge des référés qui pourra alors ordonner par l’expulsion du preneur tant de sa personne, de ses biens que de tous occupants de son chef.