Le bail commercial est souvent un élément essentiel du fonds de commerce. Pour cette raison, dans le souci de la protection du locataire-commerçant et de ses fonds de commerce le non renouvellement du bail à son terme ouvre droit à une indemnité. Ce droit du locataire est parfois aussi appelé propriété commerciale.
Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail et donner congé au locataire à condition de payer une indemnité d’éviction. Ce droit du locataire est parfois aussi appelé propriété commerciale.
Dans l’espace OHADA, le bail commercial est régi par l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général.
Les difficultés couramment rencontrées dans la pratique sont tantôt liées à la fixation de la durée du bail et tantôt à son renouvellement avec toutes les difficultés relatives aux clauses dérogatoires et à l’indemnité d’éviction.
I. LA FIXATION DE LA DUREE DU BAIL
Le contrat portant sur la location d’un immeuble affecté à l’une des activités susvisées peut avoir une durée déterminée ou indéterminée fixée librement par les parties concluantes. (Art.73 AUDCG)
Il sera réputé conclu pour une durée indéterminée lorsque les parties n’ont pas fixé de terme ou lorsque le bail n’a pas fait l’objet d’écrit entre elles.
Dans le cas d’un bail à durée déterminée et s’agissant de la durée du renouvellement, lorsque les contractants prennent le soin de la préciser dans leur contrat, cette volonté s’impose à eux et devient alors leur loi .
En revanche, en l’absence de telle précision relativement à la durée du contrat renouvelé, le contrat sera considéré comme un bail à durée déterminée de trois ans. (Art.97AUDCG).
Il s’agit là d’une durée fixée par la loi lorsque les parties, dans le cadre d’un contrat à durée déterminée renouvelable, ne prévoient pas expressément la durée par rapport à la période du renouvellement. Dans ce cas, cette durée s’impose aux parties dès lors qu’elles acceptent expressément ou implicitement le renouvellement sans que la durée soit librement fixée par elles.
L’échéance du bail constitue une source fréquente de litiges entre le bailleur et le preneur qu’il faut sans doute chercher à surmonter.
Dans la plupart des cas, les conflits entre bailleur et preneur trouve leurs sources dans la mauvaise rédaction du contrat conjuguée à une interprétation erronée de la loi.
II. CONDITIONS DE RENOUVELEMENT DU BAIL
Le renouvellement du bail à durée déterminée est soumis à des conditions et procédures bien spécifiées par l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général.
Le droit au renouvellement du bail qu’il soit à durée déterminée ou indéterminée est acquis au preneur qui justifie avoir exploité conformément aux stipulations du bail, l’activité prévue par le contrat, pendant une durée minimale de deux ans. (Art.91 AUDCG).
Ce renouvellement est soumis à des procédures précises suivant qu’il s’agisse du bail à durée déterminée ou indéterminée.
Toutefois, en raison des difficultés qu’il pose de plus en plus, c’est le renouvellement du bail à durée déterminée qui retiendra notre attention.
Dans le cadre d’un bail à durée déterminée, l’obligation est faite au preneur, qui entend renouveler le contrat le liant au propriétaire de l’immeuble, de le solliciter au plus tard trois mois avant la date d’expiration dudit bail. La sanction de cette obligation mise à la charge du preneur est la déchéance de son droit au renouvellement.
Il faut tout de même rappeler que si la demande de renouvellement est faite par acte extrajudiciaire, en occurrence par voie d’huissier, le bailleur ne dispose que d’un délai d’un mois pour faire connaitre sa réponse et à défaut, le renouvellement sollicité est réputé avoir été accepté par le bailleur. (Art.92AUDCG).
La problématique du renouvellement du bail soulève en réalité la question du sort des clauses dérogatoires et de l’indemnité d’éviction.
Ø Le sort des clauses dérogatoires
La présence de volonté même expresse des parties contractantes, notamment s’agissant d’une clause de tacite reconduction, ne peut aucunement empêcher l’application des dispositions relatives à l’obligation faite au preneur de demander le renouvellement du bail par acte extrajudiciaire dans le délai impératif de trois mois avant l’expiration de celui-ci.
Cette impérativité s’explique par le fait qu’il s’agit là de dispositions d’ordre public auxquelles les parties ne peuvent déroger de sorte que de telles stipulations ne tiennent pas lieu de loi à ceux qui l’ont faites en raison de leur illégalité.
Lorsque le preneur est déchu de son droit au renouvellement, sauf renouvellement accepté expressément ou implicitement, le maintien de celui-ci au terme du contrat constitue une voie de fait qui ouvre droit au juge même des référés d’intervenir pour faire cesser le trouble manifestement illicite.
La compétence du juge des référés s’explique par la déchéance du preneur de son droit au renouvellement ayant pour corollaire la fin du lien contractuel précédemment existant entre le bailleur et le preneur.
Toutefois, au cas où le droit au renouvellement est acquis au preneur en vertu de la loi, le bailleur ne peut s’opposer au renouvellement qu’en réglant au preneur, une indemnité d’éviction.
Ø L’indemnité d’éviction
Le contentieux relatif à l'indemnité d'éviction tourne autour de deux idées :
- Le principe du versement d’une indemnité en cas d'éviction du local commercial du locataire par le propriétaire
- L’exception au principe du versement de l’indemnité d'éviction : la faute du locataire
Il faut alors surtout distinguer selon que l’indemnité d’éviction est due ou non.
Or, très souvent, le litige a pour origine le refus par le bailleur de régler l’indemnité d’éviction auquel prétend le locataire.
En effet, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d’aucune indemnité.
L’exploitation de l’activité - Le bailleur peut, lorsque le preneur exploite l’activité pendant une période de moins de deux ans ou si ce dernier ne parvient pas à justifier qu’il l’a exploitée conformément aux stipulations du bail, décider de ne plus renouveler le contrat sans avoir à régler une indemnité d’éviction.
D’après les dispositions de l’article 95 de l’Acte Uniforme susvisé,deux cas peuvent justifier l’opposition du bailleur au droit au renouvellement et sans paiement aucun d’indemnité d’éviction.
Le motif grave et légitime - Lorsque le bailleur justifie d’un motif grave et légitime à l’encontre du preneur, il n’a aucune obligation de régler l’indemnité d’éviction.
En effet, il s’agit là d’une inexécution par le preneur d’une de ses obligations substantielles, tel le non paiement du loyer, ou la cessation de l’exploitation.
Dans ce cas, il ne pourra être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de deux mois, après une mise en demeure d’avoir à les faire cesser.
D’ailleurs, cette mise en demeure est une condition impérative de la recevabilité de l’opposition du bailleur.
La démolition de l’immeuble objet du bail - Dans le cas où le bailleur envisage de démolir l’immeuble comprenant les lieux loués et de le reconstruire, le preneur bénéficiera d’un droit de priorité pour se voir attribuer un nouveau bail dans l’immeuble ainsi reconstruit.
Le législateur de l’OHADA n’a pas précisé la forme que doit revêtir la justification à apporter par le bailleur qui sera, en tout état de cause, tenu d’apporter la preuve de sa prétention relativement à la démolition et à la reconstruction des lieux loués conformément au droit commun.
Toutefois, on pourrait aisément imaginé que s'il est établi que l'immeuble doit être totalement ou partiellement démoli comme étant en état d'insalubrité reconnue par l'autorité administrative ou s'il est établi qu'il ne peut plus être occupé sans danger en raison de son état, alors sa démolition serait justifiée et le preneur ne pourra prétendre à une indemnité d’éviction quelconque.
La reprise des locaux accessoire pour habitation - Dans l’hypothèse d’un bail portant les locaux principaux professionnels et ceux accessoires destinés à l’habitation, le bailleur qui justifie la reprise des locaux accessoires pour les habiter lui-même ou les faire habiter soit par son conjoint, ses ascendants, descendants ou ceux de son conjoint peut s’opposer au renouvellement du bail relativement aux locaux accessoires sans être tenu du paiement d’aucune indemnité d’éviction. (Art.96AUDCG).
Cette reprise ne sera possible que lorsque le preneur ne parvient pas à démontrer que les locaux accessoires sont indispensables à la jouissance de l’exploitation.
Même si le législateur de l’OHADA n’en parle pas, il faudra observer qu’une révision du contrat s’imposera aux parties en raison de la modification de l’objet du contrat en ce sens que le preneur sera privé d’une partie des locaux, objet du bail.
Contrairement au droit français, la reprise dans ce cas précis ne concerne pas la totalité des lieux loués mais seulement ceux destinés à l’habitation.
Autres motifs - L'indemnité d'éviction n'est pas due lorsque le non renouvellement est justifié par une faute du locataire. Il s’agit de l’exception au principe du droit légal au versement d'une indemnité. La faute peut est constituée par le non paiement des loyers et des charges, une absence d’exploitation du fonds, une utilisation non conforme du local pris à bail par rapport à sa destination, la déspécialisation illicite du local, des dégradations dans le local, le défaut d'assurance du local, l’absence de réalisation des réparations locatives, le non règlement des frais de réparations locatives, Etc ….
Souvent, la défaillance du preneur est sanctionnée par une clause du bail commercial dénommée « clause résolutoire » ou « clause de résiliation de plein droit » et le formalisme de la notification de cette faute est encadrée par la loi.
En tout état de cause, les parties sont libres de négocier et de s’entendre amiablement sur le montant de cette indemnité afin d’éviter un contentieux judiciaire.
A défaut d’accord amiable entre le bailleur et le preneur, le montant de l’indemnité d'éviction est fixé par le Tribunal.
Si le bailleur ne propose aucune indemnité d’éviction, le preneur a la faculté de saisir le juge compétent afin d’en obtenir.
En définitive, il ya lieu de faire observer que les dispositions de l’Acte Uniforme OHADA portant droit commercial général relatives aux conditions et formes de renouvellement du bail à durée déterminée en ce qui concerne l’article 92 qui met à la charge du preneur l’obligation de faire la demande de renouvellement dans le délai de trois mois au plus tard sous peine de déchéance sont d’ordre public. Leur application ne peut être éludée ni par les parties encore moins par le juge.
Faut-il relire ces dispositions de sorte à ce que les parties contractantes puissent renouveler automatiquement leur bail sans qu’il y ait lieu de recourir à une demande expresse du preneur ?
Toujours est-il que, lorsque le renouvellement intervient expressément ou implicitement, le contrat est valable entre les parties et doit être exécuté de bonne foi.
En revanche, lorsque le bailleur s’oppose au renouvellement alors que le preneur a manqué à l’obligation d’en faire une demande expresse dans le délai indiqué, ce dernier sera sans doute déchu de son droit au renouvellement.
Cette déchéance peut être constatée par le juge des référés qui pourra alors ordonner par l’expulsion du preneur tant de sa personne, de ses biens que de tous occupants de son chef.
BIENTOT UN NOUVEL ACTE UNIFORME SUR LE DROIT COMMERCIAL GENERAL POUVANT PRENDRE EN COMPTE LES DIVERSES PREOCCUPATIONS.
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